Côté séries est de retour avec une reco toute chaude : la série Sambre, disponible gratuitement sur France tv. Pour les aficionados du prime time, les deux derniers épisodes (5 et 6) sortiront lundi prochain sur France 2 (bien que tous soient déjà disponibles en replay).
France 2 avait annoncé une série événement et je me dois de leur donner raison. Il faut dire que les noms prestigieux devant et derrière la caméra avaient de quoi séduire. A la réalisation : Jean Xavier de Lestrade, oscarisé pour son documentaire Un coupable idéal. A l’écriture : Marc Herpoux et Alice Géraud, auteure du livre Sambre : radioscopie d’un fait divers dont la série est librement adaptée mais je reviendrai sur ce point en fin d’article. Au casting : Alix Poisson, Olivier Gourmet, Noémie Lvovsky, Clémence Poésy, Jonathan Turnbull… De plus, la chaîne a mis le paquet sur la promotion, la preuve j’ai même été convié à une conférence de presse avec un accès à la série en avant-première. Résultat : j’ai enregistré il y a un mois un épisode avec Alice Géraud pour la future saison de mon podcast 🎙Sous-titres🎙 -mais ça aussi j’y reviens en fin d’article 👇
Alors Sambre, qu’est-ce que ça raconte ? 👀
L’histoire vraie du plus grand violeur en série qu’ait connu la France, dit le violeur de la Sambre, qui a sévi pendant près de 30 ans dans le Nord, faisant plus de 56 victimes. Le triste résultat d’une société qui peine à traiter la question des violences sexuelles.
Mini-série de 6 épisodes de 52 minutes, disponible sur France 2 en cliquant là
Pourquoi Sambre est une (très) bonne série ? 👌
Beaucoup j’imagine, et j’en fais un peu partie, sont réticents à l’idée de regarder une série France 2. Et Sambre est la preuve que ce préjugé n’a plus lieu d’être tant la série est à la fois qualitative et ambitieuse.
J’aime d’une part la vision chorale du récit. C’est une des forces du genre sériel que de pouvoir embrasser le point de vue de la société sur un sujet brûlant comme la culture du viol et Sambre l’exploite ici à merveille. A chaque épisode, on épouse le point de vue d’une nouvelle personne concernée par l’affaire (victime, juge, maire, chercheuse, commissaire, violeur). Un procédé rare sur des séries criminelles qui montre bien toute l’unicité de Sambre, à la hauteur du fait divers de société qu’elle raconte.
Alors bien sûr, avec ces six histoires dans l’histoire, il y a quelques irrégularités et l’enchaînement de l’épisode 3 et 4 peut s’avérer un poil longuet. Du même, le jeu d’acteur est légèrement variable mais la série brille par l’interprétation des rôles secondaires, notamment les victimes que l’on accumule malheureusement au fil des épisodes.
Là où la série se démarque et acquiert ses lettres de noblesse, c’est grâce à l’utilisation fréquente et toujours bienvenue de plan séquence (une même prise sans discontinuité). Notamment au milieu de la série, dans l’épisode 3 qui montre à quel point tous ses personnages évoluent au même endroit, ils se croisent et se recroisent sans même le savoir. Un peu comme nous, spectateur et spectatrice, qui ayons forcément croisé un ou des violeurs dans nos vies, sans même le savoir. La série démontre à quel point ceux-ci peuvent être intégrés -ce qui les rend plus dangereux encore-, loin de l’image longtemps ancrée d’hommes en marge de la société. La série le dit explicitement avec son épisode 4, fondamentalement intéressant même si moins réussi à mon sens.
Si l’étiquette France tv était -à tort- perçue comme une faiblesse, elle devient une force en portant à grande échelle un discours important et collectif sur la question des violences sexuelles. Je m’explique.
Pourquoi Sambre porte un regard éclairant sur le viol ? 👩🏫
Jean-Xavier de Lestrade, Alix Poisson et Alice Géraud disaient à raison en conférence de presse que c’est important d’avoir une plateforme comme France 2 pour la série. Car Sambre a bel et bien des choses à dire sur les violences sexuelles, à l’attention de toutes et tous.
Comme toujours en série, c’est par les pires jeux de circonstances que l’on raconte les meilleures histoires. Celle-ci est aussi affreuse que véridique. En couvrant les crimes d’un même violeur sur trente ans, la série montre comment la société entière porte la culpabilité de cette histoire -sans disculper les actes du criminel, évidemment. Il n’y a aucune glorification dans Sambre, ni voyeurisme.
La différence entre le dépôt de plainte il y a trente ans et aujourd’hui est saisissante, encourageante si l’on peut dire. La lente prise de conscience et les mécanismes de frein sont remarquablement mis en exergue. Le suivi du personnage du flic et de la victime qu’on découvre en épisode 1 sert justement ce propos. Si cette affaire a duré aussi longtemps, c’est aussi parce que la société refusait de voir en ces hommes intégrés de véritables criminels. Bien sûr qu’on aurait aimé faire sans, mais ce n’est pas aux victimes de porter honteusement le chapeau de cette lâcheté. Et c’est à la société et aux pouvoirs publics de tout faire pour enrayer cette tendance.
Le format sériel offre le luxe d’étudier le temps long, Sambre en tire parti comme aucune série ne l’a fait avant sur ce sujet -à ma connaissance. Le poids du viol sur les victimes, le tabou lié, la honte ressentie. Tout le savoir-faire de la série se recoupe quand il s’agit du traitement des victimes.
Le choix du plan fixe sur la victime lors de son dépôt de plainte est ingénieux et redoutable : le jeu d’actrice est bouleversant et le spectateur ne peut pas détourner le regard. Il doit écouter ces terribles récits, il doit observer les traumatismes. Sambre prend le temps de montrer l’omniprésence dudit traumatisme à travers le temps, ses conséquences sur la vie sociale des victimes, leur vie intime, le rapport à leur corps… Encore une fois : c’est subtil et marquant -comme le choix des différentes musiques populaires qui viennent inscrire chaque épisode dans une époque précise, sans surlignage.
Sambre s’inscrit donc dans la lignée de ses séries importantes qui traite du consentement et du viol. A l’instar de la superbe mini-série Unbelievable (Netflix) et de l’irrévérencieuse et intransigeante I May Destroy You (Pass Warner) -cette dernière que tout sériephile doit avoir vu, dois-je me répéter ?
Pour toutes ces raisons -et d’autres encore que je vous laisse découvrir- Sambre trouvera sans aucun doute une belle place dans mon top série 2023 !
»» Je te remets le lien ici, au cas où !!
Comment adapter le réel ? 🎥👈
C’est la question qu’on se pose quand on adapte un livre journalistique qui retrace cette histoire vraie du violeur de la Sambre. C’est celle que s’est posée Alice Géraud. C’est celle que je lui ai posée lors de notre épisode de Sous-titres -à venir très prochainement.
C’est l’occasion pour moi de vous présenter la saison 2 de mon podcast. Pour rappel Sous-titres a pour mission de faire le pont entre les séries et notre société et dans cette nouvelle saison je vous invite à passer de la réalité à la fiction en discutant avec des pontes de l’industrie afin de mieux comprendre leur travail et cet écosystème au rendu magique.
Et avec Alice, on a parlé de son passage de journaliste à scénariste, de son rapport à la fiction et aux séries ainsi que de son travail sur Sambre pour que la fiction raconte encore mieux le réel. J’ai hâte de vous partager tout ça !
Pour ceux qui souhaitent découvrir la saison 1 de Sous-titres où je parle de séries avec ceux qui les vivent au quotidien, c’est par ici 👇
Sinon n’oubliez pas de voter pour votre prochaine watchlist, ça me permet d’adapter mes recommandations à vos envies 🤗
En attendant le prochain épisode je vous invite à relire la toute première critique -sur mon fameux coup de cœur : I May Destroy You
Alix poisson, j adoooore
cette série est ouf
Tu as raison d en parler il faut absolument la regarder..